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  • Valérie CAILLIEZ

Made in Respect ou Made In Le moins cher possible

Réinventer un modèle économique pour rendre le produit plus accessible aux consommateurs est la promesse de nombreuses jeunes entreprises et le Graal de millier d’autres startups. Pourtant, casser un modèle ne se fait pas sans quelques précautions d’usage. Autant supprimer des intermédiaires couteux et diminuer le cumul des marges est salvateur, autant produire au coût le plus bas peut ne pas s’avérer toujours le meilleur calcul. Ou disons que le problème est juste transféré dans un autre continent.

En effet, si vous voulez permettre à des porteurs de lunettes, appareils auditifs ou autres dispositifs médicaux, d’accéder à un produit de qualité sans pour autant débourser des sommes indécentes non remboursées par les organismes de santé, vous pouvez bien sûr décider de vous adresser directement à votre consommateur sans passer par toute la chaine actuelle d’intermédiaires et réduire considérablement le prix final de votre produit. L’idée est excellente et bouscule la chaine traditionnelle en place, l’obligeant à revoir son propre modèle ou à améliorer sa qualité de service.

Si par contre, vous voulez aller encore plus loin et produire à bas coût en Chine ou dans un autre pays d’Asie qui maîtrise les technologies en jeu, vous prenez le risque non seulement de ne pas contribuer au marché de l’emploi en France ou en Europe mais vous entrez dans la spirale infernale du prix le plus bas. Sans parler des conditions de l’emploi dans ces pays à bas salaire.

Le textile a été l’un des précurseurs de cette délocalisation massive et a ravagé son industrie en Europe de l’Ouest, perdant emplois et savoir-faire au grand dam des créateurs actuels qui peinent souvent à trouver l’industriel capable de leur produire leurs collections sur un territoire de proximité.

Si pour faire gagner quelques euros d’un côté, vous exigez de notre société européenne de supporter le coût d’un chômage lourd, de formations de reconversion importantes, de relocalisations complexes et de renouvellement d’une offre de formation initiale, la balance semble défavorable pour l’habitant européen. Certes il paie moins cher son produit à court terme mais que doit-il débourser en regard côté impôts, chômage, précarité…

Sans aller jusqu’à un Made in France puriste, sans pour autant reproduire des modèles économiques obsolètes, un juste milieu est parfois intéressant à envisager dans le plus grand respect des salariés, quel que soit leur pays et dans une recherche de plus grande proximité pour diminuer votre impact environnemental.

Utopiste dirons les uns, rétrograde dirons les autres, je pense juste que les solutions miracles n’existent pas et que la réalité économique nous rattrape souvent. Le consommateur n’est pas prêt à payer plus ? Mais vous lui faites déjà débourser tellement moins… alors ne soyez pas trop gourmands dans la course à l’offre la plus alléchante du marché, essayez d’être justes et responsables dans votre politique d’approvisionnement. Changer le monde c’est aussi changer cette folie de la course au prix le plus bas pour faciliter une consommation déjà excessive. Si vous n’avez pas autant de lunettes que de couleurs dans votre garde-robe, est-ce vraiment grave ?

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